Une vignette clinique

Les interventions du psychologue en consultations parents-enfant.

Manzano, Palacio-Espasa & Zilkha évoquent l’impact des fantasmes parentaux sur l’enfant. Ces derniers nous disent que « les fantasmes et rôles imaginaires inconscients déterminent non seulement la représentation de soi (self) des parents mais également les conduites qu’ils ont avec leurs enfants dans le sens général du terme : attitudes et comportements verbaux et infraverbaux, expressions d’affect, omissions, etc. ». En ce sens, on comprend que l’enfant réagisse à ces « pressions fantasmatiques » selon ses propres motivations, et notamment son besoin d’attachement.

En consultation, le psychologue clinicien doit recouvrir une fonction contenante pour permettre au sujet de passer des éprouvés à la représentation. Dans ces conditions, l’interprétation peut réaliser une véritable transformation. Il est néanmoins essentiel de tenir compte des écarts qu’il y a entre les références théoriques du clinicien et les théories personnelles et familiales afin que chacun puisse se reconnaitre dans les représentations qui apparaissent. Si l’on se resitue dans le cadre des consultations parents-enfants, j’estime qu’il est indispensable d’user de représentations et d’un langage qui soit adapté à l’enfant et aux parents.

              Cas clinique :

Dimitri, âgé de 2 ans et 10 mois, vient en consultation avec ses deux parents en raison d’un comportement difficile à gérer autant à la maison que chez la nounou. Les parents se plaignent du caractère « dur » de Dimitri, nous expliquant qu’il est opposant et agressif à la maison, qu’il se met très souvent en colère, mord sa soeur… Ils semblent dépassés par les comportements de leur fils. Ils ne témoignent que des aspects difficiles et négatifs de ses comportements.

Au fil de la consultation, le père, arrêté pour cause d’accident et donc immobilisé pendant plusieurs mois, souffre affreusement de sa jambe. Il nous explique qu’il pense que son fils fait exprès de faire des bêtises pour l’obliger à se lever de manière à ce qu’il ait mal à sa jambe.

Un autre élément est avancé par la mère, elle explique qu’avec son mari ils reprennent systématiquement leur fils à propos des bêtises qu’il a faites chez la nounou. Ma collègue perçois que pendant que nous nous entretenons qu’elle peut parler à Dimitri qui écoute attentivement ce qui se dit entre elle et son père. L’une de ses interventions consiste alors à expliquer à Dimitri les sentiments de son père et à faire remarquer à monsieur que son fils peut être à l’écoute, comprendre ce qu’il se passe et que ses bêtises ne sont pas faites dans le but de vouloir que monsieur souffre.

En effet, les attitudes de Dimitri ne sont pas dirigées contre son père. Cet enfant est engagé dans un processus de recherche des limites (du à son âge) par conséquent il cherche l’autorité de son papa. Ma collègue signifie alors que Dimitri n’est pas que dans une agressivité et bien qu’il semble « dur » reste un petit garçon sensible à ce qu’il se passe et ne doit pas être grondé deux fois pour ce qu’il a fait durant la journée. Assurément, à cet âge, l’enfant a des difficultés de repère espace-temps, c’est pourquoi Dimitri est confus face aux punitions reçues pour des bêtises réalisées chez la nounou alors que ses parents n’étaient pas présents.

Lors de la consultation suivante, le regard et le positionnement des parents ont beaucoup évolué vis-à-vis de leur fils. Ils sont plus souples et plus compréhensifs. Dimitri s’est apaisé, son père lui parle d’avantage et pose des limites raisonnables ; de même la mère a cessé de gérer après coup les journées chez la nounou.

Nous avons pu voir que le père a projeté sur son enfant une image infantile de soi persécutrice ou endommagée. Le parent s’identifie de façon complémentaire à celui que l’on agresse. Il s’agirait pour le parent de se décharger d’une image interne trop chargée d’agressivité ou de destruction. L’enfant est donc perçu comme persécuteur.

Anne-Solène Gatzoff, Psychologue Bordeaux

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